((entrailles))

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((Mère))
Avant, pas grand chose, juste une femme a l'esprit un peu dérangé. Une femme un peu seule. Une femme un peu triste. Sorcière, sorcière. Solitude involontaire, un Cercle fracturé, dispatché, abandonner l'Irlande pour un renouveau. Salem Village, un peu en bordure, quelque part dans la forêt. C'est des liens tranchés, des âmes liées qui disparaissent, ablation d'un membre invisible qui lui on abimé le cœur. Jolie femme qu'était la Perkins, trop seule, trop différente, à divaguer, à se perdre, dans ses brumes, dans ses pensées. Un gout de danger dans l'air, et la couleur ambrée de ses pupilles, et ses joues creusées, et son âme souillée. Mariée au malin, qu'ils murmuraient dans son dos, pauvre femme, mise en marge de la société vacillante.

((Père))
Un sortilège qui tourne mal, quelque part, un dérapage. Un sortilège qui tourne mal, ou peut être trop bien. Et le coeur qui se meurt, en un regard, pour Lui et tout le reste. Damnée, damnée, damnée. Et le Démon Vine qui répond à son appel. Comme un jeu, lui qui s'ennuyait dans l'un des cercles de l'enfer. Il a trouvé quelque chose d'attirant, dans la complainte sans queue ni tête de la pauvre Perkins. Sorcière. Il les avait toujours appréciées, plus que les autres, étranges, entre ombre et lumière, comme un doux goût d'interdit mélangé à une odeur de nostalgie. Pourquoi pas rester, un peu. Juste un peu. Pour elle. Se perdre un instant, prétendre l'amour. Se reposer des querelles infernales, ses Légions attendront, la douceur étrange d'Aoife qui lui fait perdre la tête. Entêtante. Déroutante.

((Double faute))
Ca n'aurait jamais du arriver, le ventre qui s'arrondit, et la certitude des deux vies qui se construisent à l'intérieur de sa chaire. Ca n'aurait jamais du arriver non. Pourtant, c'est là, comme ça, comme un éternel pied de nez, déjouer les limites de la réalité. Elle n'a rien vu venir, Aoife, quand les jumeaux sont nés. Elle n'a rien vu venir, cette étrange dualité, comme s'ils s'étaient partagés la nature de leur parents à pile ou face dans l'utérus. Il y a lui, bien trop sombre, tâché de ténèbres, et une aura aussi noire que de l'encre. Tel père tel fils. Il y a elle, et la magie qui frissonne déjà, autour d'elle, sorcière, chante la Lune, qui la réclame déjà.
Une séparation, Vine qui emporte son fils, et un morceau de coeur d'Aoife, pas grand chose qui lui reste, si ce n'est cette gamine un peu trop silencieuse dans les bras. Isabella.

((Enfance))
Au fond des bois, en marge, s'occuper d'une mère qui délire un peu plus chaque année, qui se laisse submerger, petit à petit. Aoife lui apprend les bases, le reste Isabella l'apprend d'instinct. Gamine trop précoce qui joue dans la cour des grands, quand sa mère dort et les sort qui dansent au bout de ses doigts. ((Tu m'entends ?)) Dans la nuit un murmure, comme un écho, qui lui montre comment faire, comme une main fantôme la guidant. Jamais seule. Jamais vraiment. Il est là, toujours, dans un coin de son esprit, miroir déformé, ils ont les même traits, comme l'impression de l'avoir toujours connu. ((Bella, reste avec moi)) quand les jours sont un peu trop dur, quand la société les rejettes elle et sa mère pour ce qui se cache au creux de leurs entrailles. Et elle l'écoute cette voix, qui la guide, jusqu'à eux, délaissant une mère qui se meurt pour découvrir une famille qui n'attend qu'à être formée.

((Cercle))
Ils sont six, comme appelés, tirés, par cette voix qui les hantent, ((Mais toi plus qu'eux)). Ils sont six : Jasper, Faith, Amber, Will, Ella. Ils sont six au sang noir qui coule dans les veines, même engeance, même génétique. Coup du destin, comme un poids qui s'enlève enfin quand ils sont tous ensembles : entiers. Pâles adolescents qui s'ignorent, qui jouent avec le feu quand personne ne les regarde. Et la voix, cette foutue voix, qui ne s'en va pas. Toujours plus forte. ((Je serais bientôt là)). Et Isabella attend, quand elle berce sa mère pour l'endormir, la maladie qui la ronge, incurable, prix à payer pour ces pactes passés, pour ce qu'elle a arraché à la réalité, ce qui n'aurait jamais du arriver. ((Réunis une dernière fois)). Et Quand Aoife finit par abandonner, il y a cette main dans la sienne, son reflet qui prend vie, lui et elle, pour enterrer leur mère, le coeur qui pleure.

((Byleth))
Il a les mots sucrés comme le miel, seule famille, revenu d'ailleurs. Byleth et ses boucles brunes, et sa candeur enfantine qui marque encore son visage. Pas grand chose de démoniaque, en apparence, si ce n'est ses idées, ses propos, camouflés, maquillés, créer un chaos malicieux. Il se veut de bon conseil Byleth, pour Isabella et puis les autres, pour le Cercle, chuchote à leurs oreilles des mots interdits, rituels bannis, proscrits, rayés des Livres des Ombres. Serment inviolable, spirales sanguines à même la peau qui pulse en harmonie chez les Six, premier pas vers le non retour. ((Ce n'est que le début)) sourire carnassier dans la nuit, l'éclat brillant de ses dents, Isabella qui tombe, tombe un peu trop fort, pour les mots de son frère, pour les jeux de son frère, pour les pièges de son frère.

((Jasper))
Une certitude, pour lui, pour elle. Les années qui passent, le coeur qui s'affole. L'amour qui crame tout, trop fort, quand ils s'embrassent. Comme s'ils n'étaient qu'un. Liés. Non. Plus. Destinés. Deux âmes qui se complètent, qui fusionnent, des promesses murmurées, eux contre le monde entier. Elle brulerait la Terre entière pour Jasper, pour ses yeux, pour son rire, pour ses baisers. Elle brulerait la Terre entière, à tout ceux qui oserait, les séparer. L'anneau passé au doigt, entourés par les autres, par Faith, par Will, par Amber, par Ella, par Byleth. Dernier jour heureux. Dernier jour où ils sont complets, dernier jour avant que tout bascule

((Salem))
Village maudit, incompréhension qui se transforme en haine, en colère, en rejet. Rumeurs grotesques qui prennent des proportions insensées. sorcières, sorcières, sorcières. Et c'est Faith qu'ils pendant la première. Sans que les autres ne puissent rien faire. Faith au bout de la corde, lapidée, fracassée, torturée. Le Cercle amputé, qui feule de douleur. Gamins rancuniers, vengeurs, et Byleth qui souffle sur les braises, attise les flammes, appuie sur la plaie.
C'est Faith puis c'est Isabella. Les aiguilles qui se plantent dans sa chaire, qui la font hurler de douleur. La tête maintenue sous l'eau et l'air qui quitte ses poumons. Déshabillée, humiliée, par ces mortels ignares, incapable d'apercevoir la vérité. Et c'est Isabella et son collier de corde, Isabella et sa colère si froide. Isabella & puis le reste, Jasper et Byleth. Isabella et quelque chose en elle, de mauvais, de sombre, de poisseux.
Quelques chose de masculin, qui ne lui appartient pas
Et le monde qui explose, la magie dans l'air, alors que la corde se brise et qu'elle chute : libre mais à quel prix ?

((Premier Sang))
Il y a la rage, qui pulse dans ses veines. Il y a la peur, qui alimente le foyer. Il y a l'envie de vengeance qui crie au creux de ses os. Elle tremble, Isabella, alors que le Cercle pense ses plaies, ses cicatrices. Elle tremble, quand Byleth la retrouve la nuit, face à face auprès du feu. (( Tu le sens toi aussi pas vrai ?)) Dans leurs veines, comme une douce harmonie.
Dernière ligne franchie, un dernier geste avant le départ, embarquer sur un navire pour l'Europe, mais avant ils laissent leur trace. Ce soir là ils sombrent un a un, première cicatrice sur le bras, laissée par une lame, et à leur pied, leurs premiers cadavres. Ceux qui ont pendu Faith, ceux qui ont touché Isabella, ceux qui ont cru, pendant un instant, pouvoir s'opposer à quelque chose d'un peu plus que vivant. Byleth les observes avant de disparaitre, tâche accompli, et entre ses doigts quatre âmes un peu noircies.

((Déambulations))
L'immortalité s'accompagne de l'euphorie. Cinq et en libertés. Cinq et tout puissants. Cinq et sans limites. Au milieu de la ronde il y a Jasper et Aurora, et ce qui résonne toujours un peu plus fort à chaque fois. Âmes-Soeurs, nouveau coup du destin, une certitude quand ils se regardent, quand ils s'aiment un peu trop fort, une explosion à chaque fois, une renaissance. Ils visitent le monde, se vautre dans la débauche, la magie terrible des premières années, sans remarquer les conséquences qui s'installent petit à petit. Non. Ils sont bien trop occupés à se regarder eux-même, à se contempler. Rois et Reines de leur petit royaume, et leur chemin tracé de carmin, les cadavres qu'ils sèment sur leur chemin. ((Est-ce que tu t'amuse bien ?))

((Schisme))
Elle ne sait plus, quand ça a commencé. Le doute. terrible. Quelque part au fond de son crâne. Elle ne sait plus, quand elle a commencé, à regarder ses mains tâchées avec dégout. Et tout ce luxe. Et toutes ces richesses. Vanités des vanités qui encrassent l'âme, qui les font stagner. L'impression de s'être perdue quelque part, d'avoir pris le mauvais tournant.
Amertume dans l'étreinte de Jasper. Ame-Soeur prison et le serment qui lui sert de bague qui l'étouffe doucement. Chute vers le vide, apnée, descente. ((Au fond pourquoi tu restes avec eux ? T'as pas besoin)). Dans un coin de ses pensées, la voix de Byleth en echo, alors qu'un soir elle fait ses bagages, silencieuse, brise le lien, leur unions. De cinq elle devient une. unique. solitaire. Isabella perdue dans la nuit, à chercher une porte de sortie, et toutes ces voix dans son crâne, toutes ces foutues voix. ((Mais moi je suis là))

((Deuil-s))
Elle a voulu recommencer. Construire quelque chose de ses mains à elle. Et le temps indécent qui coulent trop rapidement. Sur sa peau les cicatrices, accumulées, chaque âme volée, aspirée, pour continuer d'exister. Isabella qui devient plusieurs, change de nom, d'apparence, de vie, d'histoire. A aimer, des hommes, des femmes, à travers le monde. Elle a pensé, plusieurs fois, arrêter de se battre contre la fatalité, de vieillir à leur côté, de mourir en aimant et en étant aimée.
Mais elle n'a jamais réussi à franchir le pas. Trop lâche. Et de nouveau du sang sur les doigts.
Elle a aimé pourtant, comme elle a pu, du mieux qu'elle a su, de son cœur atrophié - qui appartient à un autre pour l'éternité - à vouloir fonder une famille, mais n'a fait qu'enterrer, encore et encore, tout ceux qui ont comptés. Le deuil qui brise un esprit, la perte trop douloureuse, entrailles infertiles comme une punition pour être une abomination. Il y a cette douleur permanente, lancinante, comme une supplique de l'âme. Isabella qui n'a jamais eu vraiment, ce qu'elle désire réellement.

((Brumes))
Elle s'est perdue.
Quelque part.
Entre Rome et New York en passant par Singapour.
Elle s'est perdue.
Entre les époques.
De la Guerre d'Indépendance à la Guerre froide.
Elle s'est perdue.
Entre les mondes.
Enfer et limbes, ailleurs, quelque part. Là où le voile veut bien se lever.
Elle s'est perdue.
Dans ses identités. Mortelle immortelle, sorcière démone, femme enfant, mère, amante, soeur, traitresse, meurtrière.
Le sang sur ses mains, sur ses doigts.
Et puis l'encre dans ses carnets, des pages d'histoires, à raconter, pour ne pas oublier.
Et toutes ces voix, lui, elle, eux, qui se mélangent. Passé, présent, futur.
Elle s'est perdue.
Isabella. Aurora. Aurora. Oui. Aurora c'est bien.
Recommencer.
pour mieux Oublier
Quelque part à la Nouvelle-Orléans. Les forces qui convergent. L'impression qu'elle pourra s'y cacher, qu'elle pourra s'y reposer.
Qu'elle pourra exister.